Cone of Cervix
09/29/2025

Qu’y a-t-il dans un nom ? Comprendre la Conisation en France

La conisation et et toutes ses variantes : LEEP, LLETZ, SWETZ, CKC, Laser

En tant que gynécologue américain exerçant à Paris, j’ai remarqué une particularité : en France, toutes les procédures d’exérèse du col de l’utérus sont regroupées sous un seul mot : la conisation.

Vous avez peut-être déjà entendu ce terme si votre frottis (test HPV ou cytologie) est anormal, suivi d’une colposcopie. Si les biopsies réalisées lors de la colposcopie révèlent une lésion de haut grade (CIN2, CIN3, AIS), votre gynécologue vous a probablement recommandé une conisation.

À ce stade, l’alarme est compréhensible : vous êtes confrontée à une lésion précancéreuse du col. Mais en tant qu’expat à Paris, vous vous demandez sans doute : qu’est-ce qu’une conisation exactement ? La terminologie change selon les pays, mais aussi les techniques chirurgicales — et cela a son importance, car toutes les conisations ne se valent pas ! Comme le disait Shakespeare : « What’s in a name? » Dans ce cas précis, beaucoup de choses.

Je sais combien il est stressant de faire face à un résultat anormal dans un système de santé étranger, surtout quand les termes sont différents. Ce guide a pour but d’expliquer les différences entre les diverses techniques (LEEP, LLETZ, CKC, SWETZ), ce que chacune implique pour votre santé et votre fertilité, et comment poser les bonnes questions pour rester actrice de vos choix médicaux.

Les différentes techniques et un peu d’histoire

LEEP, LLETZ, SWETZ, CKC, Laser

En France, le codage médical (CCAM) appelle toutes ces techniques “Conisation du col de l’utérus”. Mais… laquelle choisir ?

Cold-Knife Conization (CKC, conisation au bistouri froid)

  • Première description par Ayre aux États-Unis en 1948 (puis adoptée en Europe).
  • Utilisée pour traiter les lésions précancéreuses et cancéreuses du col.
  • Technique : retrait d’un coin de tissu cervical en forme de cône à l’aide d’un scalpel (d’où le terme « froid », car il n’y a pas d’énergie thermique).
  • Intérêt : absence de brûlure thermique → marges plus nettes, essentiel en cas de suspicion de cancer invasif.
  • Indication fréquente : lésions glandulaires, car elles s’enfoncent plus profondément dans le canal endocervical.
  • Inconvénients : retrait de plus de tissu → risque accru de saignements peropératoires et complications obstétricales ultérieures. Réalisée sous anesthésie générale.

Conisation au laser

  • Apparue dans les années 1970 avec le développement du laser CO₂.
  • Remplace le scalpel par un laser pour découper un cône de tissu.
  • Avantages : plus de précision, moins de saignement grâce à la coagulation.
  • Limite : reste une exérèse volumineuse de tissu.

LEEP (Loop Electrosurgical Excision Procedure, exérèse électrochirurgicale à l’anse diathermique)

  • Développée et popularisée dans les années 1970 aux États-Unis, souvent attribuée à Sheldon Weinstein (même si aucune publication originale n’existe).
  • Utilise une anse métallique fine électrifiée pour retirer la zone anormale du col.
  • Particularité : l’anse a une forme circulaire → exérèse plus superficielle, retirant moins de tissu qu’une conisation conique.
  • Meilleure technique pour les lésions ectocervicales.
  • Si l’atteinte endocervicale est suspectée, un CKC ou un LEEP plus profond peut être recommandé.
  • Différentes tailles d’anses permettent d’adapter la profondeur (généralement < 1 cm → risque réduit de saignement et de complications obstétricales).

LLETZ (Large Loop Excision of the Transformation Zone)

  • Description initiale par Walter Prendiville au Royaume-Uni en 1989.
  • Identique au LEEP, mais différence de terminologie entre États-Unis et Royaume-Uni.

SWETZ (Straight Wire Excision of the Transformation Zone)

  • Technique plus récente, développée notamment au Brésil.
  • Variante de l’exérèse électrochirurgicale : utilisation d’un fil droit plutôt qu’une anse.
  • Permet de réaliser une exérèse plus profonde, utile pour les zones de transformation dites type III (non visibles depuis l’extérieur).

Facteurs à prendre en compte

1. La pathologie : malpighienne (épithéliale), glandulaire, ou mixte ?

  • Lésions épithéliales (CIN 2/3) :
    Dans la majorité des cas, un LEEP suffit, à condition que la lésion soit bien visible sur l’ectocervix.
    Si la lésion s’étend dans l’endocol, une exérèse plus profonde est préférable.
  • Lésions glandulaires (AIS ou suspicion d’adénocarcinome in situ) :
    Nécessitent souvent un CKC ou un LEEP plus profond, car ces lésions peuvent présenter des skip lesions dans l’endocol.
  • Suspicion de cancer invasif ou biopsie douteuse :
    Le CKC est privilégié pour obtenir plus de tissu, avec des marges intactes non cautérisées, facilitant l’évaluation anatomopathologique.

2. La localisation de la lésion

  • La colposcopie (avant et pendant l’exérèse) est essentielle pour guider l’exérèse.
  • Ectocervix uniquement : LEEP généralement suffisant.
  • Endocervix impliqué : excision plus profonde (cone ou LEEP large).
  • Le choix du chirurgien et sa pratique conforme aux recommandations (colposcopie peropératoire) sont déterminants.

3. Projet de grossesse

  • Toute exérèse du col peut potentiellement réduire la longueur cervicale (en moyenne 4 cm → parfois réduite à 2 cm), augmentant le risque d’accouchement prématuré (< 37 semaines).
  • Mais : la relation entre LEEP et prématurité n’est pas directe.

Points clés issus des méta-analyses :

  • Les femmes avec dysplasie non traitée présentent déjà un risque accru de prématurité, probablement lié à l’inflammation locale.
  • Quand on compare femmes opérées par LEEP vs femmes avec dysplasie non opérée → pas de différence de risque (Kyrgiou et al., 2014, Am J Obstet Gynecol).
  • Les risques augmentent avec la profondeur/volume du cône (> 15 mm).
  • Un seul LEEP superficiel (< 1 cm), correctement réalisé, n’augmente pas le risque de prématurité.

4. Considérations anatomiques

  • Après plusieurs exérèses, le col peut devenir raccourci, cicatriciel ou difficile à accéder.
  • Dans ces cas, les techniques électrochirurgicales comportent plus de risques pour les organes adjacents → CKC parfois préférable.
  • En cas de lésions persistantes après plusieurs conisations, une hystérectomie peut être discutée.

5. Anesthésie

  • CKC ou exérèses profondes : réalisées sous anesthésie générale en raison du risque de saignement.
  • LEEP : peut être fait sous anesthésie locale (cervix anesthésié, patiente éveillée, procédure ~20 minutes).
  • Ce choix dépend de la tolérance, de l’équipement du praticien et de l’expérience.

Le suivi

  • Une seule conisation guérit la dysplasie dans ~92 % des cas.
  • La visite postopératoire est cruciale pour analyser le compte rendu anatomopathologique : type de lésion, invasion ou non, état des marges.
  • Le suivi inclut généralement : test HPV et/ou frottis à 6–12 mois, puis à intervalles plus espacés si normal.
  • La vaccination HPV peut être discutée comme thérapie adjuvante.

Perspective centrée sur la patiente

Il est normal d’être anxieuse face à une chirurgie cervicale, surtout si vous souhaitez encore des enfants et que la terminologie française vous paraît obscure. La bonne nouvelle est que les techniques modernes privilégient des traitements conservateurs et personnalisés.

Dans la majorité des cas, un LEEP unique et bien fait élimine la lésion tout en préservant la fertilité.

Questions utiles à poser à votre gynécologue :

  • Quelle technique utiliserez-vous ? (anse, bistouri froid, laser)
  • Quelle profondeur sera retirée ? (mm estimés)
  • La colposcopie sera-t-elle faite pendant l’exérèse ?
  • Quel est le plan de suivi ?
  • Puis-je bénéficier de la vaccination HPV ?

Conclusion

Si vous êtes expat à Paris et qu’on vous annonce une conisation, souvenez-vous : toutes les conisations ne se valent pas.
Pour la majorité des patientes, un simple LEEP est efficace, sûr et conserve la fertilité.
Les lésions glandulaires nécessitent parfois une exérèse plus profonde, mais une technique soigneuse permet de limiter les risques.

👉 Discutez toujours avec votre gynécologue de la technique, de la profondeur prévue et du suivi afin d’obtenir le meilleur équilibre entre guérison et préservation de la fertilité.

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